L'actualité du livre
Pocheset Littérature  

L'Equation africaine
de Yasmina Khadra
Pocket 2012 /  7.20 €- 47.16  ffr. / 352 pages
ISBN : 978-2-266-22934-0
FORMAT : 11cm x 18cm

Première publication en août 2011 (Julliard)

''Khadrature'' du cercle

Qu'on a été déçu par L'Équation africaine ! Et il n'est jamais plaisant de ne pas aimer un roman d'un auteur qu'on aime...

A tel point que l'on s'interroge : Yamina Khadra est-il véritablement l'auteur de ce récit pauvre, ou, tout du moins, est-ce lui qui en a eu l'idée et l'envie ? Il semble que non, qu'on ait là une œuvre de commande, demandée par qui ? Pourquoi ? Le succès ? L'obligation de ''produire'' ? Le besoin d'un éditeur de poser sur les étals le dernier opus de l'un de ses auteurs stars ?...

Car tout ici contredit ce que Yamina Khadra nous avait habitués à lire. Ni l'humanisme juste et pondéré, ni la poésie portée par une plume à la musicalité si touchante, pas plus que des personnages saisis dans leur complexité. Dans L'Équation africaine, tout est lisse, simpliste, manichéen et grossier, et le plus opiniâtre des lecteurs peinera à ne pas laisser le livre lui tomber des mains. Déception, grosse déception.

L'histoire d'un européen, Kurt, médecin de Francfort, qui, à la suite du suicide inexpliqué de sa femme, accepte d'accompagner son meilleur ami sur son voilier, et finit avec lui prisonnier de pirates somaliens... A la souffrance du deuil s'ajoutent alors celle de la captivité et l'incompréhension devant un continent, son peuple et sa géopolitique... Le tout plombé par un final hors sujet : de retour chez lui en Allemagne, Kurt oublie l'Afrique et comprend la mort de sa femme. Le Happy end ? Autre commande de l'éditeur, peut-être : les charmes d'une africaine permettront à Kurt de ''comprendre'' ce continent. La réponse à cette équation africaine était donc à trouver dans la chaleur d'un corps féminin...

Hors sujet, et un sujet de toute façon bâclé. Car en évitant et la fable et la rigueur documentaire, deux chemins possibles, croit-on, pour poser ladite équation, celui du journaliste, celui du romancier, Yamina Khadra condamne son récit à la source. Dès lors plat, sans intérêt, suivant par ailleurs un personnage dont on ne partage pas les jérémiades, un homme à la fois pathétique et atone, ce roman devient roman de gare, sans sel, sans peps, sans supplément d'âme.

On décidera alors de fuir, d'aller plus loin, plus au Nord, se réfugier auprès d'autres héros de Khadra, d'autres récits, plus belles fables, où l'auteur, lumineusement, a su dire avec délicatesse les blessures de notre temps. Comment un auteur peut-il autant contredire et trahir sa propre plume ? Une autre équation à résoudre : la ''khadrature'' du cercle ?...

Thomas Roman
( Mis en ligne le 17/09/2011 )
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