L'actualité du livre
Pocheset Littérature  

''Oh...''
de Philippe Djian
Gallimard - Folio 2014 /  6,80 €- 44.54  ffr. / 241 pages
ISBN : 978-2-07-045628-4
FORMAT : 11,0 cm × 17,8 cm

Première publication en août 2012 (Gallimard - Blanche)

''Ah !...''

Pas évident pour un auteur connu, attendu, de se ressembler dans son œuvre tout en se renouvelant. Avec Oh... (dernière ligne du roman), Philippe Djian y parvient, magistralement.

Le récit précipité, un ''je'' dépassé, essoufflé, celui d'une femme, qui commence par un viol et se termine par un meurtre. Une cadre dans le cinéma, quinqua divorcée de Richard, scénariste raté qui continue de lui tourner autour, mère de Vincent, qui, la vingtaine entamée, travaille chez McDo et veut élever le bébé de sa copine... dont il n'est pas le père.

La fille d'un homme emprisonné pour avoir massacré il y a quelques décennies toute la garderie d'un Club Mickey ; la maîtresse de l'époux de sa meilleure amie, Anna. La voisine d'un banquier propre sur lui mais à la libido chienne.

Elle s'appelle Michèle, prénom de ses cinquante ans. Elle traverse cette existence dans une sorte de désincarnation lucide, de cynisme hébété, spectatrice mais forte tête, désemparée par un fils qui cours tête baissée vers un mur, par une mère qui la harcèle pour qu'elle rende visite à son père tout en batifolant, sexuellement très active malgré l'âge, avec un jeunot aux motifs non voilés.

Du soap acide façon Ozon, façon Djian surtout, des êtres hagards dans un décor moderne, balisé, confortable mais sans âme, où la nature, malgré tout, se fraye toujours un chemin. Il neige durant cet hiver francilien, à cheval sur les fêtes, la glace dérive sur la Seine et le verglas maquille les allées. Michèle finit par démasquer son violeur... et commence avec lui un pas de deux impensable.

Déjà lu ? Oui et non. On reconnaît ici Djian à chaque mot, chaque lettre, chaque ligne. Une écriture haletante, blanche, un style qui jogge, emportant le lecteur dans sa tension, un effort, un plaisir aussi. Du vide, du vide, du vide, écrin paradoxal à un saisissant tableau humain... et une tendresse réelle.

Thomas Roman
( Mis en ligne le 03/02/2014 )
Droits de reproduction et de diffusion réservés © Parutions 2024
www.parutions.com

(fermer cette fenêtre)