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Pocheset Littérature  

La Valse des arbres et du ciel
de Jean-Michel Guenassia
Le Livre de Poche 2018 /  7,40 €- 48.47  ffr. / 275 pages
ISBN : 978-2-253-07371-0
FORMAT : 11,0 cm × 17,8 cm

Première publication en août 2016 (Albin Michel)

Un incendie dans la nuit

Découvrir et lire La Valse des arbres et du ciel, c'est renouer avec le plaisir enchanteur du Club des incorrigibles optimistes, de La Vie rêvée d'Ernest G. et de Trompe-la-mort. Cette fois, Jean-Michel Guénassia se penche sur la peinture et Vincent Van Gogh, lors du court séjour à Auvers Sur Oise. Ce sont les dernières semaines d'une vie interrompue tragiquement par le suicide ; telle est la version officielle du drame. En est proposée ici une version plus romanesque, plus sentimentale et plus anecdotique. L'auteur réinvente des moments intenses d'une vie, au travers d'une autobiographie fictive.

Marguerite Gachet, la fille ainée du célèbre docteur, un homme autoritaire et cupide qui accepte de soigner Vincent contre des toiles, clame dès le début du récit qu'elle ne dit que la vérité sur ce qu'elle a vécu. Elle a 19 ans, vient d'obtenir son baccalauréat, rêve de liberté, ne supporte pas la vie étriquée et ennuyeuse dévolue aux jeunes bourgeoises de son époque, projette de partir en Amérique loin du joug paternel et d'un mariage arrangé avec le fils du pharmacien. La condition féminine à la fin du XIXe siècle est l'un des fils conducteurs du récit.

Ce désir de liberté pourrait enfin être assouvi par la peinture et la rencontre avec Vincent. Ses yeux s'ouvrent sur la beauté de paysages pourtant connus, qui se révèlent sous un aspect flamboyant grâce au peintre. La question du génie artistique innerve le roman (Marguerite elle-même dessine sur des carnets), entre sentiments amoureux et révélation picturale.

Van Gogh n'apparaît pas comme un homme chétif, instable, déséquilibré ; il est ici solide, ardent, obsédé par la couleur. L'auteur parvient à rendre le choc esthétique que peut produire cette oeuvre. La reconnaissance de son talent est proche et, comme certains historiens de l'art avant lui, Guénassia émet l'hypothèse que le peintre ne s'est pas suicidé, soulevant un pan du mystère pour notre plus grand bonheur.

Le roman est construit autour de la question ambiguë de la véracité, entre imagination et témoignages ; la narration de Marguerite est entrecoupée d'extraits de coupures de journaux. La beauté naît du mélange entre mensonge et vérité, laissant libre l'imagination du lecteur, l'art consistant à conjuguer tout cela sans diluer l'identité.

Il ne faut surtout pas manquer les romans de Jean-Michel Guénassia, particulièrement celui-ci, véritable feu d'artifice littéraire.

Eliane Mazerm
( Mis en ligne le 23/03/2018 )
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