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Bande dessinéeet Réaliste  

Blessures d’amour propre
de Martin Veyron
Dargaud 2009 /  14.50 €- 94.98  ffr. / 80 pages
ISBN : 978-2-2050-6171-0
FORMAT : 24x32 cm

Retour sur auteur

En 1983, Martin Veyron publiait un album au titre intriguant, L’amour propre (ne le reste jamais très longtemps)… un titre impossible au service d’une histoire improbable : la quête du point G, le graal du plaisir féminin… Le héros s’appelait alors Martin Veyron et, quoique affligé d’une maladresse remarquable, devenait l’idole du jour en apprenant le secret d’une jouissance féminine aussi explosive qu’assurée. En 2009, voici donc la suite de ce qui était jusque là un one shot sexy et réussi… Une suite aux accents un peu amers : Martin a vieilli, l’homme est devenu un vieil homme, et l’auteur, un vieil auteur au succès ponctuel, mais sa renommée est intacte, et lorsqu’une jeune et séduisante journaliste le sollicite comme expert du point G, le voilà de nouveau sur la ligne de front, coincé entre une libido intacte et un sexe déficient… Car rapidement, le miracle a de nouveau lieu… mais le monde a changé, les enfants grandissent, les jeunes dessinateurs séduisants deviennent grands-pères et ont des problèmes de vessie. Une seule constante, les femmes ont toujours besoin de plaisir, et ça, maître Veyron sait y faire… ou presque ! Se pourrait-il qu’une femme résiste à son index jouisseur ?

Si ces Blessures d’amour propre n’ont pas la charge érotique, et révolutionnaire, du précédent album, elles ont en tous cas une saveur douce et piquante : humour, autodérision, un peu d’amertume aussi quant au passage du temps et à l’épreuve de la vieillesse. Martin Veyron est un auteur désormais connu, pas forcément reconnu, dont le succès, du fait du point G, n’a pas forcément consacré le talent…En butte aux remarques ironiques de ses lecteurs, il s’aigrit. Mais le point G vient à son secours, avec, à sa traîne, une cohorte de soupirantes frustrées. Ponctué de méditations sur la vieillesse, l’album a une couleur un peu crépusculaire qui ferait penser au roman récent de David Lodge, La vie en sourdine. Par ailleurs, les fans du premier album se retrouvent en terre de connaissance, avec un auteur heureusement resté fidèle à lui-même. Le style est intact, seuls les cheveux du héros ont grisonné et la bedaine s’est élargie… mais sinon, le mélange délicat de crudité (jamais vulgaire !), d’élégance du style font de cette suite une vraie séquelle, pensée, réfléchie, mûrie. On sourit, on rigole, on compatit, on s’interroge. Veyron est toujours cet extra-terrestre qui tente désespérément d’atterrir sur terre. Un album inattendu, mais une heureuse surprise.

Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 19/10/2009 )
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