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Bande dessinéeet Réaliste  

Le Tour de valse
de Denis Lapière et Rùben Pellejero
Dupuis - Aire Libre 2004 /  12.94 €- 84.76  ffr. / 72 pages
ISBN : 2800135425
FORMAT : 24 x 31 cm

L’enfer du goulag

C’est l’histoire de vies brisées par l’Histoire. Kalia et Vitor se marient à Alma-Ata dans les années trente. La guerre, d’abord, leur volera quatre ans de leur vie et beaucoup d’insouciance. Puis l’URSS d’après-guerre ne leur laissera que quelques mois de répit : un soir de 1946, Vitor est arrêté et envoyé dans un goulag sibérien. Kalia et leurs deux enfants ne le reverront pas pendant de longues années. Seules quelques lettres maintiendront un lien bientôt trop difficile à supporter pour Vitor, dont l’humanité se délite peu à peu. En 1953, la mort de Staline fait renaître l’espoir : des prisonniers politiques sont libérés. Mais Vitor ne revient pas. Kalia décide alors d’aller chercher son mari jusqu’en Sibérie. Parce que l’oubli n’est pas possible, et que l’attente passive a assez duré.

Le Tour de valse est le récit de cette quête, patiente et passionnée. Inlassablement, Kalia cherche des indices, des hommes qui auraient pu connaître Vitor, et lui dire ce qu’il est devenu. Mais les langues ne se délient pas si facilement dans ce climat de peur, et il faudra toute la foi de cette femme pour parvenir au bout de son combat pour se réapproprier sa vie. A la figure solaire et quasi héroïque de Kalia s’oppose celle de Vitor, l’homme broyé, défait de lui-même. A mesure que l’on découvre son histoire en suivant les pas de Kalia, on découvre aussi celle de toute une génération d’hommes et de femmes sacrifiés par le régime soviétique. Au-delà du destin de ces deux êtres, c’est donc aussi une page de l’Histoire que commémore Denis Lapière, à travers un scénario riche, subtilement construit, qui progresse lentement, et rend incroyablement palpable l’atmosphère de ces années de terreur.

Les dessins de Ruben Pellejero sont magnifiques : traits épais, couleurs savamment exploitées pour soutenir les ambiances. La brutalité du goulag éclate, la confiance de Kalia rayonne, l’anéantissement de Vitor se passe de mots. Quatre ans après Un peu de fumée bleue…, le duo Lapière-Pellejero confirme son talent et s’affirme comme une valeur sûre.

Anne Bleuzen
( Mis en ligne le 06/11/2004 )
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