Bande dessinée
Fantastique de Florence Magnin
Dargaud 2006 / 13 €- 85.15 ffr. / 48 pages
ISBN : 2-205-05735-9
FORMAT : 24x32,5 cm
Rêves et rêveurs
Se souvient-on encore d’Émilie ? cette jeune et accorte danseuse du Moulin rouge qui se retrouve un jour légataire universelle d’un manoir anglais perdu et passablement étrange. Depuis déjà trois albums, la jeune femme se démène pour tenter de comprendre quelle magie - ou quelle sorcellerie - pèse sur le manoir Hatcliff. De fait, on y croise des elfes et diverses créatures féeriques ou extra-terrestres plutôt étranges, quelques fantômes et même un homme qui refusa de mourir… Et surtout, on y disparaît facilement, passant d’une réalité à une autre. Ainsi, le fameux oncle qui légua sa fortune ne serait que disparu, parti aux trousses du secret d’immortalité d’une princesse celte, Maeve. Égaré dans une autre dimension où l’homme n’est pas le bienvenu, il survit en recherchant les cristaux de rêve. En effet, le domaine Hatcliff serait placé dans une bulle temporelle. Émilie se propose donc de ramener au bercail l’oncle voyageur, mais rien n’est simple et les rivalités s’aiguisent : le secret de l’immortalité vaut bien quelques manigances. Perdue dans un monde où rêve et réalité s’imbriquent curieusement, où le fantastique est à portée de main, Émilie va finir par regretter son moulin rouge, ses paillettes et ses plumes.
Loin des canons habituels du genre, Florence Magnin, révélée par L’Autre Monde, Mary la Noire (Dargaud) ou encore ses fabuleuses illustrations de l’univers d’Ambre de Roger Zelazny, n’en finit pas de tracer un chemin original, avec une œuvre qui, tant par son graphisme que par ses récits, dévoile un monde onirique, riche, subtil. Dans ce nouvel album, on délaisse un peu Émilie pour suivre les aventures de l’oncle Hatcliff, déambulant dans une dimension onirique où les rêves, gardés sous forme de cristaux par des créatures étranges et insectoïdes, peuvent brûler le cerveau des imprudents. C’est l’envers du décor, la réalité des rêves, un thème que Florence Magnin affectionne et qu’elle développe ici une nouvelle fois avec sa fantaisie habituelle. Entités magiques, architectures démesurées, forêts impénétrables : les fans de Florence Magnin reconnaîtront la patte de l’artiste, et son goût pour certains décors emprunts de romantisme gothique, ou encore sa fascination pour l’époque moderne, ses ornements et ses costumes. Le graphisme, classique et en même temps ciselé comme une œuvre d’art, est somptueux. Rehaussé de couleurs riches et nuancées, il entraîne doucement le lecteur dans cet univers complexe : il ne s’agit dès lors que de s’abandonner aux rêves de Florence Magnin…
Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 26/06/2006 )
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