Bande dessinée
Fantastique de Sylvain Runberg et Boris Talijancic
Dupuis - Empreinte(s) 2008 / 13 €- 85.15 ffr. / 56 pages
ISBN : 9782800140896
FORMAT : 24x32 cm
Les peuples du Nord
C’est l’envers des invasions vikings, le thème de l’arroseur arrosé ou, plus sûrement, du viking martyrisé : dans un premier tome remarqué, on se souvient qu’une tribu viking, les Svears, était sauvagement attaquée et capturée par des troupes hétéroclites, barbares, menées par un viking renégat, le tout pour la plus grande gloire de l’empire carolingien, en formation, et de l’Eglise catholique (un peu malgré elle). Les Svears étaient emmenés dans le Nord, le Svartalaheim, et destinés à l’esclavage au profit d’un peuple semi-humain étrange, les Skanes. Découvrant la condition d’esclave, Harald, Henrik et les autres Svears doivent faire face à la dureté de l’esclavage et à la trahison d’un humain renégat, véritable « kapo » des Svears, Einar… La fuite semble la seule option, encore faut-il pouvoir se libérer... Le scénario pourrait se satisfaire de cette simple intrigue à la sauce « grande évasion », heureusement, Sylvain Runberg est plus ambitieux, et nous emmène, dans le même temps, à la cour de Charlemagne où, dans l’ombre, se développe une autre intrigue, dans le conflit entre les successeurs de l’empereur, Carloman et Louis, un duel vu par un jeune esclave à la conduite étrange. Et toujours, comme un fil rouge dans cet album qui mêle habilement les deux récits, l’Eglise avance ses pions et poursuit un dessein qui leur est propre.
Le charme demeure, dans ce récit qui mêle grande Histoire (romancée), croisant Charlemagne, Alcuin… et fantastique bien déluré, avec le Svatalaheim et ses peuples étranges : les Skanes, à l’apparence monstrueuse mais aux mœurs vikings, ou bien les Funndins, plus proches des orcs ou des trolls de Tolkien que de l’humanité. Un mélange des genres bienvenu dans un univers (le haut moyen âge, la christianisation de l’Europe et les légendes nordiques) très original et donc assez captivant. Runberg entremêle les intrigues, les personnages, les mystères et nous abandonne, en fin d’album, avec l’impression qu’il reste bien des secrets à dénouer… une bonne conclusion pour attendre la suite. Si le graphisme de Boris Talijancic reste par moment un peu décevant, trop rapide (ou pas assez léché, comparé à la couverture elle très alléchante de Nicolas Fructus…), si le travail de la coloriste semble parfois un peu limité, ces petits inconvénients s’oublient facilement une fois plongé dans le récit lui-même. Bref, une série de bon niveau, pour amateurs de récits historiques à la sauce fantastique, sensibles à un scénario qui se densifie au fur et à mesure qu’il se déroule.
Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 04/03/2008 )
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