L'actualité du livre
Bande dessinéeet Humour  

Salaire net et monde de brutes
de Sébastien Marnier
Delcourt 2013 /  15.50 €- 101.53  ffr. / 160 pages
ISBN : 978-2-7560-4204-6
FORMAT : 16,5x23 cm

Dans la dèche avec des diplômes…

Ah, ce merveilleux travail précaire dont les gouvernants vantent monts et merveille, cette « variable d’ajustement » qui doit sauver l’économie et ramener les pays dans la prospérité. Un petit boulot par ci, quelques heures par là, les petits salaires qui font les grandes espérances, la chance de découvrir de nouveaux visages, de nouvelles fonctions. Le meilleur des mondes en somme ? Si l’on excepte ce monde politique qui sait parfaitement protéger sa précarité (on dit flexibilité, ça fait plus sport), pour les autres, le court terme, c’est un avenir à la petite semaine, la misère en patchwork… Elise Griffon et Sébastien Marnier ont, bien malgré eux, multiplié les expériences de jobs un peu cheap, de formations pour se motiver, de conseillers emplois vaguement psychanalystes de comptoir, de patrons gentiment catastrophés, des clients toujours plus compréhensifs. Hôtesse d’accueil sur des salons automobiles (la poésie des amateurs de grosses cylindrées), secrétaire de rédactrice hystérique, « personnage » dans un parc d’attraction géré sur le mode goulag, animateur pour labos pharmaceutiques un rien inquiétants, vendeur souriant pour des boutiques de fringues branchées, animateur de téléphones roses, etc. Tout, ils ont tout fait !

On rit jaune, on rit noir mais on rit bien avec cet album tiré d’un blog à succès : Elise et Sébastien savent, en quelques dessins et autant de paroles, mettre en scène un lieu (sordide), des clients (désagréables) ou des patrons (idem), la galère ordinaire du travail précaire avec, en arrière plan, et comme un fil rouge, une journée à Pôle emploi ou un stage de motivation (non payé) pour employés pas assez dans la team ni dans le mouv’. Le précaire, c’est celui dont tout le monde se fout, la sixième roue du carrosse, alors pourquoi se gêner ? Tous les charmes du lumpenprolétariat. Ce pourrait être une bande dessinée d’horreur, le genre de choses à envoyer à tous les thuriféraires de ce modèle économique. En tous les cas, les amateurs d’humour à vocation sociale, et de rigolade sur le mode cynique adoreront ces strips, à lire avant ou après une journée de travail.

Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 29/09/2013 )
Droits de reproduction et de diffusion réservés © Parutions 2024



www.parutions.com

(fermer cette fenêtre)