L'actualité du livre
Histoire & Sciences socialeset Période Contemporaine  

La Crise de juillet 1914 et l’Europe
de Jean-Paul Bled , Jean-Pierre Deschodt et Collectif
Editions SPM - Intarissable 2016 /  32 €- 209.6  ffr. / 335 pages
ISBN : 978-2-917232-43-9
FORMAT : 15,5 cm × 24,0 cm

Le premier mois

Après avoir publié un livre sur les guerres balkaniques en 2014, Jean-Paul Bled et Jean-Pierre Deschodt proposent ici un état des lieux européen du mois de juillet 1914, entre l’attentat de Sarajevo et les déclarations de guerre : les quelques semaines pendant lesquelles cette nouvelle crise balkanique s’internationalise sans que le Concert européen ne puisse lui trouver un règlement et sauver la paix.

La première partie du livre s’attache au contexte de la crise. Quand l’archiduc François-Ferdinand et son épouse sont assassinés le 28 juin, les tensions dans les Balkans sont déjà très vives. Les deux guerres balkaniques ont laissé des blessures profondes, tant chez les vaincus que chez les vainqueurs qui s’estiment frustrés dans plusieurs de leurs ambitions. L’Autriche-Hongrie, quant à elle, a vu la Serbie s’agrandir considérablement à l’issue de ces guerres, et elle redoute l’expansion serbe qui menace l’unité de son territoire. Ainsi, le contentieux austro-serbe est toujours très vivace, et le coup terrible qu’est l’assassinat de l’héritier du trône détermine l’empire à agir avec la plus grande fermeté.

L’internationalisation de la crise et le déclenchement de la guerre mondiale marquent l’échec du Concert européen. Vojislav Pavlović nous explique que ce processus diplomatique «était censé prévenir la mutation d’une crise régionale en une guerre mondiale». Il avait réussi à assurer la paix lors des crises marocaines et balkaniques au début du XXe siècle, mais il est incapable de juguler la dernière crise balkanique, celle de juillet 1914. Ce Concert européen fonctionnait comme un processus diplomatique multilatéral de consultations des Puissances. La stratégie de diplomatie bilatérale développée par l’Autriche-Hongrie le rend progressivement inefficace en plaçant la politique balkanique de l’empire en dehors de sa sphère d’influence, et l’équilibre des forces européennes s’en trouve affecté. Notons que le délitement du Concert européen est aussi dû à la politique d’alliances secrètes initiée par Bismarck après 1871.

La deuxième partie de l’ouvrage présente les Puissances centrales et leur gestion de la crise. La troisième partie se consacre aux Puissances de l’Entente, avec une étude particulière sur le président Raymond Poincaré et une autre consacrée à Sir Edward Grey, ministre des Affaires Etrangères anglais. Georges-Henri Soutou présente les travaux de Sean McMeekin qui analyse le positionnement de la Russie (The Russian Origins on the First Wold War, the Belknap Press of Harvard University Press, London, 2011). L’historien américain présente la Russie comme l’acteur principal dans le déroulement de la crise de juillet, manipulant et désinformant alliés et adversaires, et qui, dès le départ, aurait visé une guerre européenne. Bien que les thèses de Sean McMeekin soit probablement un peu trop tranchées, Georges-Henri Soutou rend hommage à son travail qui met en lumière le rôle prédominant de la Russie dans le déclenchement de la guerre.

Enfin, la dernière partie est consacrée à un troisième camp, et non des moindres : celui des Etats qui choisissent de rester en dehors du conflit en juillet 1914 (Italie, Roumanie, Bulgarie, Grèce, Turquie). Leur neutralité n’est que provisoire car la longueur des hostilités les oblige inéluctablement à entrer en guerre, au moment jugé le plus favorable par chacun d’eux, ou en réponse à des pressions de plus en plus fortes exercées par les belligérants.

Thérèse Krempp
( Mis en ligne le 04/11/2016 )
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