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Ministre de l'Afrique - Entretiens avec André Renault
de Maurice Robert et André Renault
Seuil 2004 /  22 €- 144.1  ffr. / 410 pages
ISBN : 2-02-062976-3
FORMAT : 16x24 cm

L'auteur du compte rendu : Sébastien Laurent, agrégé et docteur en histoire, est maître de conférences à l’Université Bordeaux III et à l’IEP de Paris. Il consacre ses recherches depuis plusieurs années aux services de renseignements militaires et policiers aux XIXe et XXe siècles. Il est le fondateur de la section "Histoire & sciences sociales" de Parutions.com.

Robert l’Africain, de l’ombre à la demi-lumière

Ce témoignage était attendu de longue date. Jacques Foccart, par ses mémoires et ses entretiens avec Philippe Gaillard, avait levé, sans fard, une partie du voile sur la réalité de la politique africaine sous le général de Gaulle et sous le président Pompidou.

Le colonel Maurice Robert, officier des troupes coloniales, spécialiste de l’action clandestine pendant la guerre d’Indochine, joua à la même époque que Foccart, et en lien étroit avec lui, un rôle central dans la politique africaine de la France. Au retour de la guerre d’Indochine où il dirigea des commandos au Tonkin, il fut au sein du SDECE - les services spéciaux français - chargé des relations avec l’Afrique. Il y implanta le SDECE et noua des relations de coopération avec ses homologues africains. Ces entretiens abordent, sans complaisance, la question du rôle de la France auprès des anciens pays décolonisés. M. Robert ne cache pas grand-chose des moyens employés par la France pour relayer son influence politique et économique. On sent une réelle empathie de ce grand connaisseur de l’Afrique pour ce continent et l’on mesure sa proximité avec Omar Bongo au premier chef, mais aussi avec la plupart des chefs d’Etat africains de l’époque. Écarté du SDECE par le président Pompidou qui voulait mettre fin aux «réseaux Foccart», il poursuivit sa carrière africaine chez Elf dont il mit sur pied les réseaux de renseignement et d’influence, puis fut nommé par Valéry Giscard d’Estaing, ambassadeur de France au Gabon, avant d’être limogé par le nouveau pouvoir en 1981.

Ce témoignage captivant, qui ne dit pas tout, met en lumière une Afrique où la France était puissante, un continent encore peu soumis aux autres influences occidentales. Ce n’est plus le cas aujourd’hui : les événements du Rwanda au début des années 1990, les progrès de l’islamisme, les affrontements récents en côte d’Ivoire indiquent incontestablement que la capacité de la France à peser dans l’Afrique francophone a considérablement diminué. N’est-ce pas l’indice d’une deuxième décolonisation ?

Sébastien Laurent
( Mis en ligne le 01/02/2005 )
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