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Histoire & Sciences socialeset Témoignages et Sources Historiques  

L'Andalousie rouge et ''la Blanche Colombe'' - & autres reportages
de Manuel Chaves Nogales
Quai Voltaire 2018 /  18 €- 117.9  ffr. / 176 pages
ISBN : 978-2-7103-7946-1
FORMAT : 11,5 cm × 19,0 cm

Catherine Vasseur (Traducteur)

A l’ombre de Lorca

Manuel Chaves Nogales, écrivain sévillan, naît en 1897. Très tôt journaliste, il dirige le journal illustré Ahora (''Maintenant'') entre 1931 et 1936, dans lequel il écrit de nombreux reportages. Pendant la guerre d’Espagne, il est républicain militant et doit fuir en France puis à Londres où il meurt en 1944. Ce recueil rassemble des articles d'une grande clairvoyance sur la situation politique, économique, sociale et religieuse de sa région natale. Ils traduisent tous le profond amour qui lie l’auteur et l’Andalousie, avec une pointe d’humour.

Dans «Les manœuvres d’Andalousie» ressortent les haines et les rivalités exacerbées à l’avènement de la 2ème République en avril 1931, avec à droite des monarchistes, et les catholiques, donc la classe aisée, et à gauche des socialistes et communistes. En juin 1931, les élections législatives confirment le succès des républicains, donnant des ailes aux manœuvres qui se sentent exploités. «Le véritable problème, c’est l’appauvrissement progressif de la richesse agricole, et donc la ruine des familles - celles des manœuvres - mais aussi des cultivateurs et même des propriétaires. En 1931, les employés refusent de faire les semis ; mais à contrecœur, agriculteurs et ouvriers finissent par s’entendre et la récolte sera sauvée». Les manœuvres andalous restent malgré tout attachés au «Señorito» car il finit toujours par leur donner du travail. Il y va de son honneur de patron. La société est encore très patriarcale. La lutte des classes apparaît avec les législatives en 1931 mais a du mal à pénétrer la société paysanne. L’environnement agricole est beaucoup plus traditionaliste.

«La semaine sainte à Séville» décrit les confréries et la mise en scène de processions obéissant à un rituel très précis et symbolique. «Dans toute l’Espagne, la religion était considérée comme le patrimoine exclusif des monarchistes. Mais les Sévillans, tant républicains que royalistes ne se faisaient pas à l’idée que leur célébration disparaisse à jamais». Les milliers de pénitents qui défilent selon un ordre immuable, visage caché, cierge sur la hanche, le font par pure dévotion ou par esprit de solidarité. L’esprit de confrérie est sacré et plus fort que la politique. La plus belle vierge est «la Macarena», emblème de Séville, avec son manteau de vingt mètres de long.

Dans l'article éponyme, Nogalès sur le pèlerinage du Rocío qui dure une semaine et est suivi par toute la population de la région d’Almonte. La vierge del Rocío, comme beaucoup de vierges espagnoles, a été cachée pendant les invasions sarrasines puis retrouvée et laissée près d’un arbre sous la reconquête, elle est l’objet de toutes les formes d’adoration.

«Au galop l’aurore
Accourt.
Les étoiles
Prennent la fuite
L’aurore accourt sur un cheval noir»
.

Le poids des traditions en Espagne retient l'entrée dans le monde moderne au début des années 30. La ferveur populaire le dispute aux drapeaux républicains, entre anarchisme et dévotion. Voici un petit recueil d’articles délicieux, poésie et ferveur populaire qui se briseront en 1936.

Eliane Mazerm
( Mis en ligne le 16/01/2019 )
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