L'actualité du livre
Essais & documentset Politique  

Le Rebelle et le roi
de Béatrice Gurrey
Albin Michel 2004 /  15 €- 98.25  ffr. / 237 pages
ISBN : 2-226-15576-7
FORMAT : 15x23 cm

Obsédés du pouvoir

La biographie de Nicolas Sarkozy semble sur le point de devenir un genre littéraire à part entière et l’on pourrait, de prime abord, s’interroger sur l’utilité du livre de Béatrice Gurrey. Néanmoins, abondance de bien ne nuit pas, et ce serait faire un mauvais procès à une journaliste politique que de lui reprocher d’écrire sur l’homme politique le plus en vue du moment et sur ses rapports avec le Président de la République.

Par ailleurs, l’angle d’approche de cet ouvrage est assez original. En effet, plutôt que de filer, ad nauseam, la métaphore du fils prodige et prodigue, l’auteur part d’un débat, organisé par Le Monde, dans lequel Nicolas Sarkozy, interrogé sur ses ambitions présidentielles, assurait qu’on l’empêcherait de se présenter, parce que l’on était en monarchie. C’est sur cette idée d’un Chirac-roi auquel s’opposerait un Sarkozy-rebelle, que vont s’appuyer les 26 chapitres de ce livre qui s’attache à nous peindre le portrait de ces deux hommes qui ont en commun d’avoir adopté une devise du général Leclerc : «Dans l’existence, on ne réussit que si l’on est obsédé par une idée». L’idée en question étant, bien sur, de conquérir le pouvoir et de le garder.

S’ensuivent alors 230 pages, pleines d’anecdotes sur le microcosme politique et de portraits croqués d’une plume désabusée. L’auteur a d’ailleurs la bonne idée de multiplier les citations et ce sont Chirac et Sarkozy eux-mêmes qui nous amusent. Le premier en moquant, par exemple, la taille de son cadet : «Nicolas ? Il lui manque 5 centimètres pour vraiment réussir», le second en fustigeant, au lendemain d’un débat avec Le Pen, la pusillanimité de l’Elysée: «Qu’est-ce que c’est que ces gladiateurs en salon, qui n’aiment débattre qu’avec des gens qui leur ressemblent ?».

Mais que penser, in fine, de ces deux hommes, dont l’un habite les palais de la république (Matignon, l’Hôtel de Ville de Paris et l’Elysée) depuis 40 ans tandis que l’autre vise à l’en éjecter ? Que penser d’une démocratie dont deux des principaux protagonistes sont décrits, par un observateur avisé, comme des hommes dont l’ambition est inversement proportionnelle à la force des convictions ? Que penser de ce Président qui refuse de choisir un Premier ministre que tout son camp appelle de ses vœux pour éviter de lui permettre d’acquérir une stature comparable à la sienne ? Que penser d’un ministre de la République qui adopte des idées libérales, atlantistes et communautaristes, principalement pour se démarquer de son encombrant aîné ?

L’auteur ne répond pas à ces questions, préférant manifestement rester dans un domaine léger et futile qui, pour être agréable, n’en est pas moins quelque peu stérile.

Olivier Agnus
( Mis en ligne le 09/02/2005 )
Droits de reproduction et de diffusion réservés © Parutions 2024



www.parutions.com

(fermer cette fenêtre)