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Quelque chose me dit que... - Entretiens avec Andrea Camilleri
de Marcello Sorgi
Fayard 2002 /  15 €- 98.25  ffr. / 159 pages
ISBN : 2-213-61159-9

Traduit de l'italien par Alain Sarrabayrouse

Camilleri, le voisin d'Italie

L'âme sicilienne se révèle dans la contradiction : un exercice dans lequel excellent Andrea Camilleri, l’écrivain le plus populaire d’Italie, et Marcello Sorgi, rédacteur en chef du quotidien La Stampa qui ont eu le bon goût de réunir l'objet de leurs conversations dans un livre d’entretiens émaillé d’anecdotes plus réjouissantes les unes que les autres.

A l’image des déboires du jeune Camilleri qui sera exclu de l'Académie de théâtre pour une histoire de jupons - ou plus sûrement en raison de son orgueil sicilien, chevillé au corps, qui lui interdira de reconnaître sa faute. Camilleri deviendra malgré tout un célèbre metteur en scène. Et dans quelles conditions ! Ce n’est que tardivement qu’il entre en littérature. Il a 53 ans en 1978, quand son premier roman est publié. C’est Sciascia qui le conseille : "la structure la plus vraie, pour un écrivain, c’est le roman policier." Conseil suivi. A partir d’un simple fait divers, il se lance dans les enquêtes du commissaire Montalbano, qui recueilleront instantanément les suffrages du public. L’auteur s’interroge sur les raisons de cette réussite. Pour lui, cette série reste "superficielle", une "écriture de passe-temps de bon niveau". Son explication ? Il y avait un vide à combler : "l’artisanat de bon niveau a fait le succès du cinéma aux Etats-Unis. Tandis qu’en Italie, ou bien on est Fellini, ou bien on est rien."

En parallèle, ses romans policiers historiques, l’autre versant de sa production littéraire, remportent eux aussi un beau succès. Parfois supérieur à celui des enquêtes de Montalbano, notamment avec La Concession du téléphone. Là encore l’imagination s’inspire du réel. Le plus souvent d’archives historiques. Mais l’auteur l’assure : l’histoire importe peu. Priorité à "la galerie de personnages". Et donc à l’idiome local. Pour lui, "le dialecte est l’essence véritable des personnages". Voilà pour la leçon d’écriture.

Au fil de l’entretien pourtant, à force de questions, le journaliste finit par mettre en lumière le secret de Camilleri. Qui, en dépit de son caractère on ne peut plus sicilien et de ses multiples références aux dialectes, considère la "sicilitude" comme "quelque chose de négatif". Un poids dont il lui fallait se débarrasser. Son talent a donc été de puiser la chair de ses histoires dans le régionalisme, pour ensuite le dépasser, et placer ces récits à la portée de tous.

Sandrine Martinez
( Mis en ligne le 21/03/2002 )
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