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Poches -> Littérature |
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Johnny, tu n'es pas un ange... | | | Joyce Carol Oates Johnny Blues Le Livre de Poche 2004 / 8 € - 52.4 ffr. / 692 pages ISBN : 2-253-10814-6 FORMAT : 11x18 cm
Première édition : octobre 2002 (Stock). Imprimer
Romancière reconnue (elle a reçu plusieurs prix littéraires prestigieux aux Etats Unis, et son nom a été avancé à deux reprises pour le prix Nobel de littérature), auteur prolifique (plus de 70 romans à son actif, elle écrit aussi sous le pseudonyme de Rosamond Smith), Joyce Carol Oates a pour unique sujet lAmérique. Amérique contemporaine, réelle et rêvée, quelle traque sous langle du fait divers avant den dresser la comédie - ou la tragédie humaine. L Amérique dans sa complexité et ses contradictions.
Dans Johnny Blues, le point de départ est le meurtre commis par un adolescent, Johnny, sur lamant de sa mère, qui la brutalisait. La famille de Johnny est arrivée quelque temps auparavant dans la paisible banlieue résidentielle de Willowsville. Immédiatement la famille Heart a choqué la bonne société : choquée par la Cadillac rose saumon, les tenues blanches de la mère, Dahlia Heart, vamp issue de limaginaire américain, à mi-chemin entre Marylin et Grace Kelly, le grand père Aaron Leander Heart, mi clochard mi fou, les enfants silencieux (Johnny, Farley, Shirleen), et le refus de se mêler à la vie locale.
Le récit est entièrement construit en flash back, et en deux parties inégales. Dans la première, la narration reprend les souvenirs des adolescents du lycée de Willoswille, état de New York, et décrit par le menu la fascination que tous éprouvent pour Johnny, fascination renforcée par le meurtre. Johnny, frère jumeau de Marlon Brando- entre L'Équipée sauvage et Un tramway nommé désir - est ce solitaire qui les a côtoyés sans les voir et sans mesurer à quel point sa seule présence les bouleversait. Le ton est donné dès la première phrase du roman : «Il fut un temps où, à Willowsville, village de 5640 habitants, sis dans lÉtat de New York, dix huit kilomètres à lest de Buffalo, toutes les filles de douze à vingt ans (et beaucoup dautres qui ne le disaient pas) étaient amoureuses de Johnny Heart »
Tout lart de Joyce Carol Oates consiste à tendre un fil entre le rêve incarné par Johnny et la réalité décrite par petites touches au cours de la narration : les adolescents des années soixante, ce quils sont devenus - morts, divorces, réussites sociales et mariages malheureux, destins inaccomplis ou tout simplement médiocres - et le souvenir jamais effacé de Johnny
dont la ballade composée par un groupe de rock lors du procès ouvre les chapitres. Une description impitoyable - et dautant plus quaucun jugement nest jamais prononcé - de la société américaine des années 60, du puritanisme, du cloisonnement social, de la difficulté des rapports entre sexes. Un univers tout entier marqué par le silence et le non-dit. La seconde partie, plus brève, est lhistoire de Johnny, et donne quelques réponses aux questions que se posait le narrateur. Lensemble constitue un excellent roman, solidement construit, dans la grande tradition du roman américain. Le livre refermé, le souvenir des personnages demeure.
Marie-Paule Caire ( Mis en ligne le 23/07/2004 ) Imprimer
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