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"Nous avons tenu à ne pas sortir d'âneries..."
Un entretien avec Jeanne Puchol et Rodolphe - Assassins, tome 1 : Le Docteur Petiot (Casterman, 2009)


Assassins, tome 1 : Le Docteur Petiot (Casterman, coll. Ligne Rouge, 2009).
Photo Rodolphe : (c) Dargaud.

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Ils ont travaillé ensemble pour la première fois sur le tome 7 des Abîmes du Temps (Vent des Savanes, 2008). Leur duo fonctionnant bien, ils ont décidé de poursuivre. Ils signent aujourd'hui "Le Docteur Petiot", premier tome de la série Assassins, des "biopics" de criminels hors du commun. Rencontre avec Jeanne Puchol et Rodolphe.

Parutions.com : Vous avez signé pour les 3 premiers tomes de la série Assassins chez Casterman. Comment est né ce projet ?

J. P. : À dire vrai, ce projet de collection consacrée à de grandes affaires criminelles a d’abord été conçu pour… Albin Michel ! À l’automne 2006, nous venions de terminer le tome 7 des Abîmes du temps, « Le temps volé », et Gisèle de Haan, l’éditrice qui avait suivi cet album, souhaitait que nous lui proposions de nouvelles idées. Ce que nous avons fait, avec « Assassins ». Là-dessus, Albin Michel décide de vendre son département BD. Les tractations, tout d’abord prévues avec Soleil, se poursuivent pendant un an, et c’est finalement Glénat qui rachète. Par scrupule envers ce repreneur, chez qui allait finalement paraître « Le temps volé », nous lui avions réservé la primeur de ce nouveau projet, qui n’a pas retenu son attention. Comme j’avais eu un bon contact avec Arnaud de la Croix, chez Casterman, pour un autre projet non retenu, je le lui ai alors envoyé, fin 2007, et l’accord a été immédiat. Il y a donc actuellement trois volumes prévus, avec la même équipe. Pour la suite, rien n’est encore arrêté, mais a priori, nous devrions avoir notre mot à dire…

R. : … et si l’éditeur est d’accord, nous suivrons très certainement !

Parutions.com : Pour les trois premiers tomes, Petiot est très connu, Violette Nozières un peu moins et le Vampire de Düsseldorf encore moins : n’aurait-il pas été moins risqué de choisir des figures plus évocatrices, comme Charles Manson ou Landru ?

R. : Je ne vois pas ce qu’apporte la célébrité en la matière… Le risque est avant tout celui de s’ennuyer à l’écrire et dessiner, et pour le lecteur, celui de bâiller en lisant. Ce sont pour moi les seuls risques. En ce qui concerne les stratégies commerciales, ce n’est pas de notre ressort et de toute façon, ça ne m’interesse pas vraiment…

J. P. : Rodolphe avait préparé une liste de criminels, parmi lesquels Petiot et Nozières, mais nous avions décidé de démarrer avec le Vampire de Düsseldorf, qui se déroule à une époque passionnante – la fin de la république de Weimar sur fond de crise mondiale et de montée du nazisme. C’est Casterman qui a préféré commencer la collection avec une figure en effet très connue, le docteur Petiot. Cela dit, Nozières et le Vampire ne sont pas franchement des « inconnus » : Chabrol a tiré un film de la vie de la première, le second a inspiré à Fritz Lang son M, le maudit. Landru, de son côté, a déjà fait l’objet d’une bande dessinée assez récente sous la plume de Chabouté (Vents d’Ouest, 2006), qui a réalisé là une sorte de pendant français au mémorable From Hell, l’autopsie de Jack l’éventreur par Moore et Campbell (Delcourt, 2000).
En ce qui concerne Charles Manson, son cas sort des limites que nous nous sommes fixées avec Rodolphe : nous ne souhaitons pas traiter d’affaires trop récentes, à la fois pour des raisons éthiques et juridiques ; ni de criminels qui s’en prennent à des personnalités. En outre, une série consacrée à Manson est en cours chez Glénat. Le choix d’affaires datant d’au moins cinquante ans nous permet une certaine distance avec le sujet, et donne l’occasion de traiter d’une période historique que chaque album s’attache à dépeindre, au moins autant que son « héros ».

Parutions.com : Rodolphe, vous avez opté pour un point de vue externe et une narration distanciée, objective…

R. : En effet. De la distance, bien sûr ! Mais je ne crois guère en l’objectivité… Toute approche a sa part de subjectivité, je pense. La limite qu’imposent ces sujets est le coefficient de sympathie : on ne saurait humaniser des monstres sans réduire du même coup l’horreur infligée aux victimes. Entrer dans la peau de ces gens-là n’est pas totalement possible. Et heureusement !

Parutions.com : Vu le nombre de détails dans le scénario, vous avez dû beaucoup vous documenter ?

R. : Oui ! Nous avons tenu, Jeanne et moi, à ne pas sortir des âneries…

Parutions.com : Construire un récit en 48 pages a-t-il été difficile ?

R. : Oui. Il aurait fallu 60 ou 70 pages pour pouvoir donner plus de place à certaines scènes significatives : la période de Petiot grand résistant et grand épurateur aurait sûrement mérité un développement, par exemple. Son procès également… Ce que j’ai voulu faire ressortir du personnage, c’est son ambivalence, l’aspect insaisissable, contradictoire (apparemment) de sa personnalité : Janus et ses deux visages. Docteur Jekyll et Mr Hyde… « Je suis la plaie et le couteau » (Baudelaire).

Parutions.com : Jeanne, votre trait réaliste se prête parfaitement à une série comme Assassins, et vous aviez déjà donné dans la BD « biographique » avec un album sur Jean Monnet. Vous étiez donc en terrain conquis pour ce projet ?

J. P. : Je m’étais essayée à la biographie avant même Jean Monnet, bâtisseur d’Europe (Editions de l’An 2, 2006). Ce dernier album est quand même à part, puisqu’il s’agit d’une commande de la région Poitou-Charentes, à l’occasion des cinquante ans des Traités de Rome, Jean Monnet étant, comme chacun l’ignore, natif de Cognac. Je fais allusion ici aux trois récits écrits par Laurent-Frédéric Bollée (scénariste, entre autres, d’Apocalypsemania) et parus dans le magazine « À suivre » entre mai 1993 et avril 1995 : « Poète contumace » racontait la vie du poète Tristan Corbière, « Asile vénitien » évoquait la figure du baron Corvo, et « Fleur bleue » suivait les pas de la chanteuse Fréhel. Ces trois destins devaient trouver leur place dans un cycle de sept « vies », regroupées dans un ensemble intitulé Cabaret des espoirs. Le cycle fut interrompu sans raison, puis « À suivre » cessa de paraître, Casterman fut racheté par Flammarion… Ces soixante premières pages n’ont jamais été publiées en album.

Parutions.com : Quelles sont les principales difficultés, en tant que dessinatrice, lorsqu’on s’attaque à un projet de ce type ?

J. P. : La difficulté, lorsqu’on s’attelle à une biographie, est principalement d’ordre documentaire. Or, avec Petiot, le problème était inverse : il y avait trop de documentation ! Sur Petiot lui-même, j’ai trouvé sur Internet une abondance de photos qu’il était parfois difficile de situer dans le temps ; quant à la période de l’Occupation, elle nous est tellement familière grâce aux nombreux films, documentaires et surtout de fiction, auxquels elle a donné lieu. De plus, tous les lieux parisiens, en dehors de l’hôtel de la rue Le Sueur, existent toujours. Bref, impossible de faire « n’importe quoi » ! Le hasard a voulu qu’ait lieu, alors que j’étais en cours d’album, l’exposition du photographe André Zucca, « Les Parisiens sous l’Occupation », montrant certes des clichés réalisés pour la presse de l’armée d’occupation, mais, de manière quasi providentielle, tous en couleurs. Cela m’a beaucoup aidée à reconstituer les ambiances, et a été d’un grand secours pour notre coloriste.

Parutions.com : N’est-ce pas un peu frustrant d’être « seulement » dessinatrice sur un album, quand on a beaucoup publié en tant qu’auteur « complet » ?

J. P. : Chaque exercice a ses avantages et ses inconvénients ! Quand je travaille sur un scénario écrit par quelqu’un d’autre, je peux éprouver des difficultés à m’approprier son univers et son mode de narration. Mais je suis « déchargée » d’une partie de la responsabilité de l’histoire, si bien que je peux davantage me consacrer au dessin, à des aspects parfois purement techniques. Il m’est arrivé de changer mes propres scénarios, pour ne pas avoir à représenter telle ou telle scène qui m’aurait mise en difficulté ; avec un scénariste, je joue le jeu. Et puis chacun est le premier lecteur de l’autre ; ce regard critique, quand il est respectueux et constructif, ce qui est le cas avec Rodolphe, contribue beaucoup à améliorer le récit et à rompre un isolement dans le travail qui peut se révéler parfois étouffant.

Parutions.com : De quelle manière avez-vous travaillé, tous les deux, sur ce premier tome ?

J. P. : Rodolphe m’envoie son scénario – sur Petiot, c’était en temps réel ou presque, je recevais le scénario par tranches de sept pages car il avait tout d’abord travaillé sur le Vampire de Düsseldorf ; le changement de sujet et les délais prévus par Casterman ne nous laissaient pas le loisir de faire autrement. À partir de là, je fais mes recherches documentaires, je crée les personnages et je réalise le découpage dessiné, sur lequel nous échangeons au fur et à mesure : je suis parfois amenée à lui suggérer des modifications et lui de même, sur le nombre de cases, des détails du texte ou de dessin, etc.

R. : On communique, on parle, on téléphone, on se maile, on se voit, il arrive même qu’on déjeune ensemble en évoquant les vies passionnantes de nos frères assassins dont certains seront peut-être nos prochaines victimes (artistiques !).

Parutions.com : Où en êtes-vous des 2 prochains tomes ? Une collaboration de cette sorte se rode-t-elle au fil des tomes ?

J. P. : Je suis actuellement à la moitié du volume 2, qui se passe dans l’Allemagne des années 30…

R. : … et on commence à réfléchir sur le tome 3.

J. P. : Notre mode de fonctionnement n’a pas tellement évolué depuis « Le temps volé », pour la simple et bonne raison qu’il a été au point dès cette première collaboration !

Parutions.com : Rodolphe, le tome 5 de Kenya vient de sortir : y aura-t-il une suite après ce cycle ? Et où en est Trent ?

R. : Un second cycle de 5 titres, qui ne s’appellera plus Kenya mais Namibia (avec toujours le personnage de Cathy Austin), va démarrer en janvier prochain. Il y aura également une intégrale en décembre et une « novellisation », une version roman de Kenya, en deux volumes, qui paraîtront chez Mango courant 2010. J’achève en ce moment l’écriture du tome 1. Quant au sergent Trent, il tire sa révérence dans l’intégrale tome 3, annoncée pour juin, qui contiendra ses adieux au public sous forme d’un inédit : « Capitaine Price ».

Parutions.com : Jeanne, quels projets d’albums en cours ?

J. P. : Je viens de terminer un récit sur les mariages forcés, pour un album collectif consacré aux violences faites aux femmes, à paraître en septembre aux éditions Des ronds dans l’O. J’ai aussi été récemment pressentie par Lucien Rollin pour illustrer un scénario de Valérie Mangin dans la collection « Sorcières », en préparation aux éditions Dupuis (on peut lire une présentation de ce label sur www.auracan.com/Indiscretions/indis.php?actu=225).

Parutions.com : Si vous aviez un ou deux albums à nous conseiller pour nos lectures de printemps ?

R. : Je conseillerais La Légende du Changeling, de Dubois et Fourquemin chez Le Lombard, et la géniale adaptation de L’Etoile Matutine de Mac Orlan par Riff Reb’s dans la collection Noctambule, chez Soleil (sortie fin mai, NDLR). Voilà…

J. P. : Joker !


Propos recueillis par Anne Bleuzen
( Mis en ligne le 11/05/2009 )
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