Zacharie Baqué Journal d’un poilu - août 1914 – décembre 1915 Imago 2003 / 19 € - 124.45 ffr. / 219 pages ISBN : 2-911416-90-2 FORMAT : 14x23 cm
L'auteur du compte rendu: Agrégé et docteur en histoire, Jean-Noël Grandhomme est l'auteur d'une thèse, "Le Général Berthelot et l'action de la France en Roumanie et en Russie méridionale, 1916-1918" (SHAT, 1999). Il est actuellement PRAG en histoire contemporaine à l'université "Marc Bloch" Strasbourg II. Imprimer
Instituteur, comme les parents de son ami et compagnon darmes Henri Alain-Fournier, Zacharie Baqué est né à Vic-Fezensac (mais la date nest pas précisée). Portant les dates «1914-1915», son manuscrit sarrête à la date du 4 décembre 1915, pour une raison restée ignorée car lauteur a en tout cas bel et bien survécu au conflit. Il est mort en 1950, non sans avoir préparé lédition de ce Journal composé à partir de ses lettres du front (et finalement publié plus de cinquante ans après sa mort).
Le fait nest pas si courant, Baqué a appartenu au même régiment (et à son régiment de réserve) pendant toute la guerre : les 88e et 288e dinfanterie, ceux de lauteur du Grand Meaulnes. Après la bataille de la Marne, il participe à la poursuite des Allemands que lon croit un instant en déroute. Cest au cours de lun de ces combats incertains où se fixe jour après jour la ligne de front, le 22 septembre 1914, quil voit tomber le jeune écrivain presque à ses côtés. Pour ce seul récit dun événement devenu presque mythique jusquà la découverte de la fosse commune des tués du 288e en 1991, son Journal vaut la peine dêtre lu par tous les passionnés de la Grande Guerre.
Mais là ne réside pas son unique intérêt, loin sen faut : Baqué décrit lenthousiasme des mobilisés à Mirande en août 1914 (les départs en chantant et la fleur au fusil ont véritablement existé, et pas seulement dans les grandes villes du nord de la Loire, comme laffirment certains historiens daujourdhui). Il nous narre aussi par le menu ces terribles combats du début du conflit, si coûteux en vies humaines, que les horreurs de la guerre de positions ont longtemps fait oublier, et que lon ne cesse de redécouvrir. «Voilà un an quà pareille heure je prenais contact avec les réalités de la guerre, écrit-il le 5 septembre 1915. Je croyais sincèrement que «ça» allait être court. Maintenant je ne sais plus, je ne pense plus, jattends.» La résignation a fait place aux espoirs des débuts. Comme pour des millions dautres combattants, le conflit sera encore long. Démobilisé le 15 février 1919, Zacharie Baqué regagne enfin son Gers natal, qui lui inspirera plus tard plusieurs ouvrages.
Document dépouillé de grands artifices littéraires, même si certains passages ont sans nul doute été réécrits après la guerre, ce Journal présenté sans appareil critique par Henri Castex se lit dune traite et lon ne peut que regretter de voir lauteur sarrêter en si «bon» chemin, au bout dà peine plus dun an de guerre.
Jean-Noël Grandhomme ( Mis en ligne le 31/01/2004 ) Imprimer |