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Littérature -> Essais littéraires & histoire de la littérature |
| Marc-Édouard Nabe Le Vingt-septième livre Le Dilettante 2009 / 10 € - 65.5 ffr. / 92 pages ISBN : 978-2-84263-168-0 FORMAT : 12cm x 18cm
L'auteur du compte rendu : Essayiste, romancier, Jean-Laurent Glémin est titulaire dun troisième cycle en littérature française. Ayant travaillé notamment sur les sulfureux Maurice Sachs et Henry de Montherlant, il se consacre aujourdhui à lécriture de carnets et de romans. Il na pas publié entre autres Fou dHélène, LImprésent, Fleur rouge, Chair Obscure, Continuer le silence. Imprimer
On ne présente plus Marc-Édouard Nabe (né en 1958). Pamphlétaire, diariste, essayiste, romancier, poète ; et comme lindique le titre de louvrage, vingt-sept livre sont parus depuis 1985, date à laquelle Au régal des vermines a contribué à fixer lécrivain dans la catégorie des subversifs incompris et menacés
En 2005, Le Dilettante réédite Au régal des vermines pour les vingt ans de la première publication. MEN rédige alors une longue préface expliquant son parcours et sa carrière décrivain dans le milieu affreux du parisianisme bourgeois et frileux. Cest cette fameuse préface où il dit tout ce quil pense depuis longtemps qui est publiée cette année de manière autonome. Une présentation qui devient alors un texte bref, mais aussi et surtout une lettre à son ancien voisin du 103 de la rue de la Convention : Michel Houellebecq.
Un constat amer est soulevé sous la plume de Nabe : Houellebecq a réussi quand lui a échoué. Sur près de cent pages, Nabe va tenter de se lexpliquer. Alors que cétait lui le nouveau Céline, lécrivain génial qui aurait dû être célébré de toute part, voilà que depuis 1998, date à laquelle paraissent Les Particules élémentaires, on vénère Houellebecq, dautant plus que les ventes suivent depuis dix ans. Crise de jalousie, ou prise de conscience de lépoque ? On préfère lennui, la neurasthénie, la condition déprimante de lêtre à celui qui célèbre lamour fou, la passion du jazz, la sexualité débridée, mais aussi quelques provocations calculées, nous sermonne lauteur de Je suis mort. Bref, Houellebecq a écrasé Nabe. En feignant de le lui reprocher, Nabe ne se prive pas de dire ce quil pense de cette littérature-là. Mais cette comparaison a pour but daller plus loin, de rejeter le système éditorial parisien, de se positionner en tant que victime permanente, puis de revenir sur ses fameuses casseroles : On accuse Nabe dêtre antisémite depuis Au régal des vermines, et bien dautres choses encore.
Nabe voudrait quon parle de ses livres. En négatif ou pas, il sen fiche, mais il veut apparaître dans les colonnes des journaux quil hait tant et qui lostracisent pour ces raisons. Soit, mais cest ignorer la vérité et le statut dun écrivain, qui ne valent que par ce quil écrit puis publie. Jean-Paul Bertrand, à qui il rend hommage, a permis à Nabe de vivre de sa plume pendant dix ans alors quil ne vendait pas un livre ! Bref, Nabe joue la victime quand il devrait continuer décrire sans aborder ces questions de jalousie, de reconnaissance et de salut. Lécrivain sest toujours heurté au pouvoir quel quil soit, et cest un défaut dorgueil que de réclamer quon parle de soi ! Mais pour continuer à écrire, il faut mieux vendre, et cest là que cela coince pour lui. Si quelques-uns connaissent Nabe (qui dailleurs est régulièrement invité sur les plateaux télés depuis vingt ans), ils sont apparemment peu nombreux à lacheter !
Comme souvent chez Nabe, on passe du coq à lâne, du public au privé, de la littérature à lanecdote. De la cuisine relookée par Hélène sa femme, aux cocktails littéraires en passant par ses rencontres avec Houellebecq, Sollers ou Hallier, Nabe sadresse à son confrère. Il extrapole, il fantasme, il décrit aussi un certain nombre de choses justes et pertinentes sur lépoque et ses incommensurables injustices. La situation de lécrivain du XXIe siècle par exemple, avec aux deux antipodes Houellebecq et Nabe. Le héros et l'être déchu, à moins que tous deux soient des héros déchus dans leur domaine.
En 1985, Nabe écrivait dans son essai quil publierait vingt-sept livres, doù le titre de cette préface, autrement dit le dernier. Depuis, à part quelques tracts collés sur les murs de la capitale, lhomme sans éditeur (édité chez Le Dilettante !) na rien publié. Ce qui lui donne en partie raison. Nabe déçu par tant de méchancetés à son encontre dit quil abandonne. Et cest regrettable. En même temps on ne le croit pas et lon sait quun nouveau livre arrivera sur les rayons des FNAC... quil critique tant.
Jean-Laurent Glémin ( Mis en ligne le 30/01/2009 ) Imprimer
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